L’OMS a fait de la surdité une priorité nationale de santé publique. À l’occasion de la journée qui y est consacrée, le Dr Arnaud Devèze, ORL au sein de l’Hôpital privé Clairval à Marseille, dévoile quelques conseils pour réduire au maximum les risques auditifs chez les plus jeunes comme les plus âgés, mais aussi pour restaurer l’audition des personnes les plus fortement touchées. L’enjeu est de rappeler l’importance de cette prise en charge, car une surdité qui n’est pas traitée de façon précoce peut notamment entraîner des troubles de la mémoire importants.Un enjeu de santé publique pour faire disparaître la surdité totale
360 millions de personnes dans le monde souffrent de déficience auditive incapacitante*, soit plus de 5 % de la population mondiale
1. Vaincre la surdité est donc un enjeu plus qu’important. Globalement, la moitié des cas de déficience auditive peuvent être évités en prenant des mesures de santé publique
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La surdité totale et définitive peut même disparaitre si elle est traitée de façon précoce. En effet, une personne prise en charge dès les premiers symptômes peut-être complètement soignée. A l’inverse, plus la prise en charge est retardée et les symptômes installés, plus la personne s’expose à des risques de déclin cognitif. Par exemple, selon des études scientifiques récentes, chez les personnes âgées le fait de ne pas traiter la surdité à temps peut augmenter les risques de démences ou même d’Alzheimer.
Autre point important, l’impact économique que cela entraîne. Selon l’OMS, les interventions pour la prévention, l’identification et la prise en charge des déficiences auditives ont un bon rapport coût/efficacité sur le plan social et restent très bénéfiques au niveau individuel. Il est donc essentiel de les recommander.
La prévention à tout âge
« Dès l’apparition des premiers symptômes, nous encourageons les personnes à consulter pour être prises en charge de la meilleure façon. Un appareillage précoce avant que la surdité ne soit handicapante pour le patient est primordiale, ce qui lui permet de retarder voire d’éviter tout symptôme », explique le
Dr Devèze.
1,1 milliard de jeunes (de 12 à 35 ans) risquent une déficience auditive par exposition au bruit dans un cadre récréatif
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« En effet, les jeunes sont de plus en plus exposés à la surdité, via l’écoute de musique à fort volume. Cela peut se manifester par des acouphènes notamment », développe le Dr Devèze. L’OMS confirme ces propos puisque chez les enfants de moins de 15 ans par exemple, 60 % des cas de déficience auditive sont dus à des causes évitables
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Selon le Dr Devèze, la surdité est “réversible” si la prise en charge est précoce.
« Les personnes atteintes de déficience auditive voient leur état amélioré grâce à un dépistage précoce. Dans le cas inverse, plus la surdité s’installe plus le patient est dépendant des autres, et se renferme, ce qui peut entraîner un déclin cognitif et les symptômes de dépression, de replis sur soi ».
Plusieurs traitements peuvent être mis en œuvre : les appareils auditifs, les dispositifs d’aide à l’audition et les implants cochléaires, mais également une assistance orthophonique lorsque la surdité est bien installée et qu’elle a atteint le système cognitif.
Lutter contre les troubles de la mémoire grâce à un travail en commun avec un orthophoniste
Les personnes appareillées tardivement sont souvent sujettes à des risques de déclins cognitifs tels qu’une perte de la mémoire. L’appareillage associé à un travail en relation avec un orthophoniste devient donc particulièrement efficace et pertinent pour ce type de patient.
L'orthophoniste permet tout d’abord un réapprentissage de la lecture labiale ainsi que de la production de la parole. Son travail est également nécessaire quant aux traitements de l’ensemble des troubles de la communication via une approche psycho-cognitive. « Après un bilan initial, des préconisations thérapeutiques sont à envisager, afin de travailler la perception, le rappel des caractéristiques sonores et des mouvements labiaux. Cette phase sera favorisée grâce à la mise en exergue de la réception des phrases en lecture labiale de face ou de profil ainsi qu’à un travail d’éloignement de la source sonore et dans le bruit (principal plainte des patients).
Il convient de souligner que les confusions phonologiques prédominent dans une conversation en milieu bruyant, ou en groupe. La réception des bruits de l’environnement n’est pas satisfaisante.
Par ailleurs, un renforcement des compétences sous-jacentes (mnésiques et attentionnelles) est à considérer. Enfin concernant la mémoire, nous utilisons différents exercices et astuces à réutiliser au quotidien pour permettre à la personne d’être plus attentive », explique Margaux Franceschi, Orthophoniste au sein de l’Hôpital privé Clairval.
Une prise en charge qui permet au patient de retrouver un environnement social agréable et de sortir de son isolement social pour ainsi de réduire le déclin cognitif installé.
Pour aller plus loin, l’approche multidisciplinaire est également intéressante, via la consultation d’ORL, d’audioprothésistes et de gérontologues.
En conclusion, la surdité totale et définitive est en voie de disparition, mais il est important de rappeler qu’une prise en charge précoce est le meilleur des traitements pour les patients.
* La déficience auditive incapacitante correspond à une perte d’audition supérieure à 40dB dans la meilleure oreille chez l’adulte et supérieure à 30dB dans la meilleure oreille chez l’enfant.
1 Source : http://www.who.int/mediacentre/factsheets/fs300/fr/
2 Le dollar international est une unité de compte définie par la Banque mondiale